LES VOLEURS ET L'ÂNE
Pour un Âne enlevé deux Voleurs se battaient :
L'un voulait le garder, l'autre le voulait vendre.
Tandis que coups de poing trottaient,
Et que nos champions songeaient à se défendre,
Arrive un troisième Larron
Qui saisit Maître Aliboron.
L'Âne, c'est quelquefois une pauvre province :
Les Voleurs sont tel ou tel prince,
Comme le Transylvain, le Turc , et le Hongrois.(1)
Au lieu de deux j'en ai rencontré trois :
Il est assez de cette marchandise.
De nul d'eux n'est souvent la province conquise (2):
Un quart (3) Voleur survient, qui les accorde net (4)
En se saisissant du Baudet. |
Illustration : J.B. Oudry
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Sources : L'apologue d'Esope "Le lion, l'ours et le renard"
figurait dans "Esope" de Gryphe, (Lyon 1536)
Après des versions françaises du XVIe, qui avaient remplacé les
animaux par des humains, d'autres
versions françaises, écrites au XVIIème auraient
servi de source à La Fontaine.
La fable est peut-être issue de la situation politique internationale
dans les Balkans à cette époque.
"La sagesse de cette fable rejoint celle de
"l'huître et les plaideurs" " (M.Fumaroli, Fables éd.
la Pochothèque)
(1) Il était question en 1661 que la Turquie déclare
la guerre à l'Empire qui avait des prétentions
sur la Hongrie et la Transylvanie.
(2) Souvent, la province n'est conquise par aucun d'eux.
(3) quatrième : ici, l'Empereur qui annexe la Transylvanie (baudet de la fable) en 1699.
(4) à l'époque, le "t" final pouvait ne pas se prononcer |
Illustration : F. Chauveau |
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