Javascript Menu by Deluxe-Menu.com fable Jean de La Fontaine : les deux coqs
portrait de Jean de La Fontaine le corbeau de la fable jardin de la maison natale actuellement le perron de l'entrée de la maison
Fable, Jean de La Fontaine, 
Les deux Coqs,  Livre VII, fable 13 
 

LES DEUX COQS

Deux Coqs vivaient en paix ; une Poule survint,
Et voilà la guerre allumée.
Amour, tu perdis Troie (1) ; et c'est de toi que vint
Cette querelle envenimée,
Où du sang des Dieux même on vit le Xanthe (2) teint.
Longtemps entre nos Coqs le combat se maintint :
Le bruit s'en répandit par tout le voisinage.
La gent qui porte crête au spectacle accourut.
Plus d'une Hélène au beau plumage
Fut le prix du vainqueur ; le vaincu disparut.
Il alla se cacher au fond de sa retraite,
Pleura sa gloire et ses amours,
Ses amours qu'un rival tout fier de sa défaite
Possédait à ses yeux. Il voyait tous les jours
Cet objet rallumer sa haine et son courage.
Il aiguisait son bec, battait l'air et ses flancs,
Et s'exerçant contre les vents
S'armait d'une jalouse rage.
Il n'en eut pas besoin. Son vainqueur sur les toits
S'alla percher, et chanter sa victoire.
Un Vautour entendit sa voix :
Adieu les amours et la gloire.
Tout cet orgueil périt sous l'ongle du Vautour.
Enfin par un fatal retour
Son rival autour de la Poule
S'en revint faire le coquet : (3)
Je laisse à penser quel caquet,
Car il eut des femmes en foule.
La Fortune se plaît à faire de ces coups ;
Tout vainqueur insolent à sa perte travaille.
Défions-nous du sort, et prenons garde à nous
Après le gain d'une bataille.

Source : version en français dans Millot, fable 145 : Les coqs (La Fontaine, fables, M. Fumaroli, éd. La Pochothèque)

Le burlesque est le résultat d'un contraste entre la bassesse du sujet et l'emphase des termes employés.
(1) la guerre de Troie fut causée par l'enlèvement d'Hélène par Pâris
(2) le fleuve Scamandre de la plaine de Troie, où les Grecs et les Troyens se livrèrent combat (dans l'Iliade).
(3) le galant (jeu de mots sur l'étymologie de coquet : petit coq )


Illustration de J.J. Grandville (1803-1847)
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